Les Solitaires

histoire originale incomplète, 9 chapitres


Bon, je pense qu'il est d'usage que je me présente avant de commencer cette histoire.

Je m'appelle Alice Terringhan et souvent, les gens pensent à tort que je m'appelle Alistair Inghan. C'est bête non ? Je suis plutôt petite avec des cheveux bruns et des yeux vrun. Le vrun est une couleur que j'ai inventée quand j'avais quatre ans pour décrire mes yeux. Ils ne sont ni verts, ni bruns. Ils sont vruns. Je vis avec ma mère en banlieue mais passe mes week-ends chez mon père qui habite à la campagne. J'ai aussi un grand frère - mais lui habite avec mon père - et une petite sœur. Ma mère s'est remariée quand j'avais dix ans donc ma sœur ne l'est pas réellement mais c'est tout comme.

Donc, reprenons notre récit.

Comme mon amie n'étais pas là le premier jour, je ne m'étais pas mêlée à la foule d'étudiants qui faisaient de nouvelles rencontres, discutaient de leur été et autre bavardages normaux pour une rentrée des classes. Non, ça c'était le rôle de Mina de se faire des amis. Moi je préférais de loin être seule même si j'adorais Mina.

Le deuxième jour, il restait encore quelques cas sociaux qui, comme moi, n'avaient pas chercher à trouver qu'un avec partager leur vie parmi tout ces étrangers ou alors qui n'avaient tout simplement pas pu car personne ne voulait d'eux. C'est triste de voir comme les adolescents sont cruels avec les autres... Toujours est-il que le deuxième jour, il était là. Il se tenait tout à l'arrière de la classe, silencieux, invisible. Mais moi, je l'avais vu.

Étant donné que nous n'étions que le deuxième jour de cours, nous pouvions encore choisir nos places et, malgré le fait que je sois plutôt de celles qui se mettent à l'avant pour mieux suivre en cours, j'allais m'asseoir à côté de lui, gardant une place libre à ma droite pour Mina. Il ne me lança pas un regard de toute la matinée mais moi j'eus l'occasion de le regarder en détails. Ses yeux bleus ne me voyaient pas, suivant minutieusement le cours, tandis qu'une de ses mains aux fins doigts tirait sur une mèche de ses cheveux noirs. Il dégageait une impression de déjà-vu, de douceur et de calme. Souvent, il remontait négligemment ses lunettes sur le bout de son nez et continuait à suivre le cours, prenant des notes de sa main droite, ébouriffant ses cheveux de sa main gauche.

Tout a commencé à la fin de la matinée, juste avant que nous puissions aller déjeuner. Alors que nous rangions nos affaires dans nos sacs respectifs, quatre garçons de la classe se sont approchés de nous. Enfin, de lui.

- Alors Erwin ? Ça gaz ? demanda alors l'un des garçons avec un sourire narquois et mauvais.

- Lâche moi Sebastian... répliqua Erwin en essayant de s'en aller.

Le truc est qu'ils étaient quatre contre un, ce qui est vraiment déloyal. Sebastian a donc commencé à frapper - doucement d'abord puis plus fort par la suite - notre cher Erwin qui, à mon plus grand étonnement, se laissa faire.

- Eh, pourquoi tu dégagerais pas ? me proposa soudainement l'un des garçons alors que je regardais la scène avec stupeur. J'ai tenté de répondre quelque chose mais tout ce qui est sortit de ma bouche ressemblait plutôt à un sanglot. Pourtant, je ne pleurais même pas. Finalement, ils ont tous levés les yeux vers moi et j'ai remarqué que je pleurais réellement. Pourquoi l'adolescence est-elle si cruelle ?

- Les mecs ça craint ! Venez on se casse ! déclara finalement un autre garçon avant de prendre ses affaires et de partir en courant, suivis de ses compères. Me rendant compte du ridicule de la situation, je les ai rapidement imités, me joignant au bal disgracieux de la foule qui se rendait à la cafétéria.

Pourquoi est-ce que j'avais pleuré ? Cette question tourna dans mon esprit durant toute la pause déjeuner. Je ne m'en étais même pas rendue compte... Ça avait juste coulé silencieusement. C'est ridicule non ?

Alors que je finissais mon dessert, quelqu'un vint s'asseoir en face de moi, sans un mot.

- Je m'appelle Erwin. Erwin Grant. Et toi c'est Alister Inghan, non ?

- Euh, Alice Terringhan. Prénom, nom... marmonnais-je timidement.

- Ah. Et bien on peut dire que ça porte à confusion ! il éclata alors d'un rire doux.

- Euh, oui... répondis-je doucement.

- Tu es bonne actrice en tout cas, Alice. Pleurer comme ça sur demande, ça ne doit pas être facile ! En plus, ces idiots ont cru que tu étais ma copine...

- Mais je...

- Non, ce n'est rien. Merci ! Bon, il faut que je partes. À plus tard, Alice Terringhan ! déclara-t-il en marquant bien l'espace entre mon prénom et mon nom de famille. Je soupirais et finissais mon déjeuner avant de sortir dans la cour.

L'été partait doucement mais la chaleur était toujours là. La plupart des gens portaient des t-shirts, des débardeurs, des shorts ou des jupes. Pour ma part, je préférais les jupes donc j'en portait des noirs, basiques avec une chemise ou alors un débardeur. Ce jour-là n'était pas une exception. J'avais aussi relevé mes cheveux bruns en deux petits chignons de chaque côté de ma tête: ma coiffure préférée. Bon, arrêtons de tergiverser sur les vêtements des gens en été, car de toute façon c'est toujours les mêmes. Après la discussion éclair entre Erwin-l'homme-mystère (c'est le surnom que je lui ai donné) et moi, j'ai passé la journée à travailler et plus à m'occuper de savoir où les mystérieux yeux bleus de Erwin-l'homme-mystère regardaient.

Le troisième jour de cours, Mina était enfin de retour. Sa démarche sautillante, ses jolis yeux noisettes, son teint bronzé et ses cheveux clairs qui sautillaient au rythme de ses pas m'avaient manqué.

- Alice ! s'exclama alors ma meilleure amie, fendant la foule d'élèves pressés.

- Mina ! répondis-je, bien moins activement qu'elle.

- Faut que tu me racontes tout ! Il y a des beaux garçons dans la classe ? Et les profs sont sympas ? Allez, dis moi tout !

- Euh, je sais pas... Les profs sont sympas... Et les garçons... Euh... Chacun ses goûts, hein ?

- On t'a déjà dit que tu étais une meilleure amie inutilement géniale ?

- Euh, non.

- Et bien je te le dis !

- D'accord... Mina éclata de rire. Je l'emmenais jusque dans la classe et on alla s'asseoir aux places que je nous avais gardées la veille.

Erwin arriva quelques secondes avant la sonnerie et il se hâta de s'asseoir. Quand il tourna la tête dans ma direction, il devint livide. Pourquoi était-il comme ça, soudainement ? La réponse arriva quelques minutes plus tard quand une boule de papier froissée atterrit sur ma table.

« Pourquoi tu traînes avec cette fille ? Elle est mauvaise ! » -Erwin

Je le regardais étrangement. Mina n'était pas mauvaise et même si elle l'était comment pouvait-il le savoir ? Ils ne se connaissaient même pas ! Je soupirais et continuais à suivre le cours.

À la fin de l'heure, Mina me prévint qu'elle allait se chercher à boire à la cafétéria avant de sortir de la classe en trottinant. Non, vraiment Mina était une bonne personne.

- Terringhan ! hurla soudainement quelqu'un dans mes oreilles.

- Aïe...

- Désolé d'avance Terringhan mais c'est urgent ! murmura Erwin en m'attrapant par l'avant-bras et m'entraînant ainsi dans le dédale des couloirs du lycée. Arrivés à la sortie ouest du bâtiment, je le forçais à me lâcher.

- Pourquoi tu fais ça ? demandais-je d'une voix qui se voulait menaçante mais on aurait plutôt dit un bébé loutre se battant pour un morceau de poisson frais.

- Calme toi, Terringhan ! il éclata de rire avant de retrouver son sérieux.

- Explique-moi tout ! ordonnais-je doucement.

- Bon, ton amie, Mina, c'est ça ? j'acquiesçais. Elle a voulu sortir avec un de mes potes il y a deux ans mais il a refusé et le lendemain, il est venu à l'école avec des vêtements roses pétants. Deux jours plus tard, ses cheveux étaient bleus ! il s'était mis à crier en posant ses mains sur mes épaules, me secouant d'avant en arrière.

- Les vêtements roses ? Sérieusement ? Ce n'est pas le genre de Mina.

- Normal vu que c'est une autre fille qui lui a fait ça, mais ce n'est pas important ça. Ce qui est important c'est que cette fille est dangereuse !

- On ne se connaît pas. Tu ne me connais pas. Tu ne connais pas Mina. Alors laisse-moi ! étonnamment, il me lâcha.

- Terringhan, méfie toi des gens. Souvent, ils ne sont pas ce qu'ils veulent être. Et ils sont encore moins ce que nous voulons qu'ils soient !

Après l'incident de ce jour, Erwin ne m'adressa plus la parole et plus je regardais Mina, plus je voyais en elle un démon caché dans un corps d'ange. Je ne sais pas si je devenais parano mais j'avais l'impression qu'elle était plus mesquine qu'avant.

- Alice ? Est-ce que tu es amoureuse de "Monsieur bizarre" ? me demanda-t-elle un jour pendant la pause déjeuner.

- Monsieur bizarre ? répétais-je dubitativement.

- Oui, Erwin ! Le gars bizarre avec les lunettes et les cheveux noirs !

- Ah, lui. Non. Pourquoi j'en serais amoureuse ?

- Parce que Sebastian et Oliver m'ont rapporté que lui, il t'aime ! déclara-t-elle tout en sirotant son soda.

- Ne dis pas de bêtises ! rétorquais-je en sentant le rouge me monter aux joues.

- Bon, de toute façon, tu aimes bien Théo Barrington, non ? elle me taquinait souvent avec lui car, le premier jour où elle était arrivée, elle avait remarqué que Théo me regardait souvent en classe. Je soupirais avant de hausser les épaules.

- De toute façon, je préfères réussir en cours que d'aller faire la chasse à l'homme ! avouais-je en regardant le ciel.

- Bof, les cours, à quoi ça sert ? Juste à passer le temps jusqu'à qu'on se trouve un boulot, non ?

- Mina... Tu es incorrigible ! Bon, je dois passer chercher un livre à la bibliothèque, tu m'accompagnes ?

- Sans façon ! Je vais aller voir Sebastian !

- Arrêtes de traîner avec lui, ces gars pensent que les filles sont des trophées et qu'elles sont intouchables ! C'est ridicule !

- Je trouve ça plutôt valorisant ! me répondit Mina en s'éloignant. Je soupirais de nouveau et ramassa mes affaires avant de me hâter à la bibliothèque.

Je m'avançais vers la porte quand celle-ci s'ouvrir violemment, s'écrasant contre mon visage et me faisant tomber durement contre le sol.

- Aïe... marmonnais-je en caressant ma joue endolorie.

- Oh, je suis désolée ! s'exclama la fille qui avait causé tout ça. Elle repoussa une mèche de ses cheveux blonds et me tendit une main qui semblait tellement fragile qu'on aurait pu croire qu'elle allait se briser. Ses yeux verts me fixaient avec douceur et ses lèvres s'étiraient en un large sourire.

- Moi c'est Victoire Bach ! Et toi ?

- Euh, Alice Terringhan...

- Oh, Alister Inghan ? Comme ça sonne bien...

- Non, en fait c'est...

- C'est Alice Terringhan. Prénom, nom. Tout le monde se trompe toujours ! répondit quelqu'un à ma place. Je me retournais pour faire face à la personne qui m'avait coupée et je restais étonnée de me trouver devant Erwin. Il était vraiment grand ! Il devait mesurer dans le mètre nonante ! Bon, arrêtons de divaguer. Je me relevais sans peine, ne sollicitant pas l'aide de Victoire.

- Tu sais Alice, j'aime beaucoup ton prénom. Tu veux bien échanger ?

- Mais... Un prénom ça ne s'échange pas...

- Mes parents m'ont appelée comme ça à cause de la déclaration d'indépendance... commença-t-elle sans nous prêter attention, ni à Erwin, ni à moi.

- Vu que je suis née un quatorze juillet, ils ont pensé bon de m'appeler comme ça ! continua-t-elle, imperturbable. Je lançais un coup d'œil à Erwin. Ce dernier semblait se retenir de rire. Je ne compris pas tout de suite avant d'apercevoir ce qui le faisait rire: Victoire avait un pan de sa jupe remonté vers le haut - sûrement coincé dans ladite jupe - et donc on pouvait apercevoir un bout de sa petite culotte.

- En plus, ma mère est française donc un prénom en français s'imposait, vous comprenez ? j'acquiesçais, me retenant de rire et Erwin m'imita.

- Bon les amis, je dois m'en aller ! J'espère vous revoir très bientôt !

- Adieu ! lança Erwin en riant. Son rire avait quelque de doux et rauque à la fois. Je frissonnais puis reprit mes esprits.

- Bon, je... commençais-je mais Erwin me coupa.

- Je dois y aller ! À plus tard, Terringhan ! il m'adressa un signe de la main et je fis pareil avant d'enfin entrer dans la bibliothèque. Je réussi enfin à emprunter le livre que je convoitais et m'apprêtais à sortir quand je fonçais de nouveau dans quelqu'un. Ce n'était vraiment pas ma journée !

- Oh, désolé ! s'exclama le garçon qui était en face de moi. Il repoussa une mèche de ses cheveux blonds et me tendit le livre que j'avais fait tomber pendant la bousculade.

- Euh, ce n'est rien ! il pouffa et m'adressa un grand sourire. Ses yeux verts me fixaient avec douceur et je sentis le rouge me monter aux joues.

- Stephen King hein ? Un écrivain de talent ! Tu as du goût !

- Oh, merci... murmurais-je en rangeant le livre dans mon sac. Je lui dis un petit "au revoir" et me dépêchais de sortir du bâtiment.

La deuxième semaine de cours touchait à sa fin et pourtant j'avais l'impression d'être au lycée depuis des années. Erwin et Victoire venaient souvent me voir et cela ne semblait pas plaire à Mina qui était de plus en plus distante et froide.

- Tu es sûre que ça ne te dérange pas que je passe le trajet avec Victoire et Erwin ? lui avais-je alors demandé quand nous devions nous organiser pour le camp de montagne que nous allions faire.

- Non. C'est bon. Va avec eux. Je resterais avec Sebastian.

- Tu... D'accord... je me sentais mal pour elle mais tout ça sortit bien rapidement de mon esprit quand je vis Victoire arriver en sautillant, suivie par Erwin.

- Venez ! Je vais vous présenter Charlie ! s'exclama-t-elle en nous faisant signe de la suivre. Je ramassais donc mes affaires, dis "au revoir" à Mina et partit à sa suite.

- Qui est Charlie ? me demanda Erwin alors qu'on marchait à travers les couloirs.

- Je ne sais pas... Il paraît qu'elle a une sœur jumelle, c'est sûrement elle.

- Ah oui, pas bête ! nous suivîmes donc Victoire encore cinq bonnes minutes quand elle sauta au cou d'un garçon qui n'était autre que celui que j'avais croisé à la bibliothèque.

- Charlie, je te présente Erwin Grant et Alice Terringhan !

- Alister Inghan ? Joli prénom pour une jolie fille ! s'exclama-t-il avec un sourire franc.

- Non c'est... commençais-je mais Erwin me coupa.

- C'est Alice, prénom, Terringhan, nom de famille ! Tout le monde se trompe tout le temps !

- Ah, je vois. Vous sortez ensemble ?

- Quoi ? Non ! m'écriais-je devant Charlie qui éclata de rire avant de tapoter mon épaule.

- Je rigole ! Et donc, ce sont eux tes amis ?

- Oui ! Tu as vu comme ils sont géniaux ? demanda Victoire, tout excitée.

- Ça fait trois minutes, même pas, que je suis censé les connaître alors comment veux-tu que je saches si ils sont géniaux ou pas ?

- Ton instinct mon cher frère, ton instinct ! s'exclama la blondinette en tournant sur elle-même.

Charlie était donc réellement le frère jumeau de Victoire. Les mêmes cheveux blonds clairs, les mêmes yeux verts pétillants. La seule chose les différenciant était leur caractère. Victoire était plutôt lunatique, tête-en-l'air et rêveuse tandis que Charlie semblait plus posé, organisé et terre-à-terre. Les deux opposés ! Charlie était vraiment gentil même si il restait discret. Je marchais à l'arrière, à ses côtés, tandis que Victoire sautillait devant avec Erwin.

- Je suis désolé pour tout à l'heure. Je pensais vraiment que vous étiez en couple. Je m'excuse ! lança-t-il soudainement en s'arrêtant et en se mettant face à moi, ses mains sur mes épaules, ses yeux plongés dans les miens.

- Oh. Ce n'est rien !

- Tu es sûre ?

- Certaine ! le rassurais-je avec un petit sourire. Il m'en fit un en retour, enleva ses mains de mes épaules et en profita pour caresser ma joue. Je tressaillis face à ce contact inopiné. Je ne le connaissais pas. Il ne me connaissait pas. Et il me caressait la joue. Peut-être ressemblait-il plus à sa sœur que je ne le pensais...

Le camp avait lieu la semaine d'après et nous devions nous organiser par nos propres moyens, ce qui était supposé nous maturiser. Erwin, Victoire et Charlie m'avaient proposé de venir dans leur équipe et j'avais accepter vu que ça n'avait pas l'air de déranger Mina qui passait son temps pendue au coup de Sebastian. Ça me faisait bizarre. Avant nous étions toujours l'une avec l'autre et depuis notre arrivée au lycée, elle était distante...

- Eh, Terringhan ! s'exclama Charlie alors que je me rendais aux casiers. Je me retournais vivement et il me rentra dedans violemment, nous faisant tomber. Il s'étala de tout son long sur moi tandis que ma tête frappa violemment le sol. Il se releva rapidement et me tendit sa main que j'attrapais. Je me remis sur mes pieds, sûrement un peu trop rapidement car le décor autour de moi commença à tourner. Je m'accrochais au pull de Charlie.

- Alice ? Ça va ? demanda-t-il, une pointe d'inquiétude dans la voix.

- Oui, je me suis juste levée trop vite. Désolée...

- Ce n'est rien, ne t'excuse pas ! On va déjeuner ? j'acquiesçais et le suivit jusqu'à la cafétéria.

Comme Erwin avait un cour renforcé de mathématiques et Victoire d'art plastique, nous les attendions souvent ensemble le mercredi. Alors que je griffonnais des choses sans queue-ni-tête sur mon cahier, je me souvins que Charlie m'avait appelée par mon prénom, quand j'avais la tête qui tournait. Chose que Charlie ne faisait jamais habituellement. Un sourire se dessina sur mon visage; Charlie devenait de plus en plus mon ami et cela me faisait plaisir.

Après une heure d'attente, Erwin déboula dans la cafétéria, ses livres de cours sur la tête, marchant comme un équilibriste. Derrière lui, Victoire était morte de rire et sautillait pour replacer les livres dès qu'ils commençaient à glisser. Charlie, le nez plongé dans un livre ne les vit pas arriver et sursauta quand sa jumelle lui tapa dans le dos.

- Victoire ! Ne fait pas ça ! s'exclama-t-il en soupirant devant la face amusée de la blondinette. Erwin s'installa à côté de moi et se mît à sourire bêtement. Je regardais Charlie et nous soupirâmes en chœur devant nos deux amis qui se comportaient de manière étrange.

***


Alors que nous déjeunions, Mina, Sebastian et le reste de leur bande sont entrés dans la cafétéria. Ma meilleure amie m'adressa un signe de la main que je lui rendis puis elle suivit Sebastian. Jusqu'à à notre table.

- Ah mais qui voilà ? C'est Erwinychou avec ses amis ! Enfin... Une folle, un nerd et une solitaire, j'appelle pas ça des amis... Qu'est-ce que t'en dis Mina ? la concernée le regarda en souriant puis posa un regard hautain sur nous.

- C'est sûr que ça vole pas haut.

- Mina ! m'exclamais-je alors, prête à me lever. Erwin posa sa main sur mon ventre pour me retenir et se leva à ma place. Devant Sebastian, il était beaucoup plus grand et imposant mais ses cheveux en bataille et ses lunettes lui donnaient un air plus vulnérable, comme ces garçons stupides et beaucoup trop grands.

- Sebastian, sérieux. Laisse-les tranquilles, ils ne t'ont rien fait, eux... est-ce que ça veut dire qu'Erwin avait déjà fait quelque chose à Sebastian qui lui valait de se faire frapper ?

- Tu as raison. Même si ils sont ridicules, ils ne m'ont rien fait... C'est dommage, ça aurait été marrant de voir cette blonde pleurnicher ! ricana-t-il, suivit de Mina et sa bande. Finalement, ils partirent manger eux aussi, nous laissant tranquilles.

- Erwin ? hasardais-je mais il ne me laissa pas caser un mot et il s'en alla. Victoire et Charlie se regardèrent et haussèrent les épaules, continuant leur déjeuner. L'après-midi, je ne revis pas Erwin, ce qui m'inquiéta un peu.

***


Le lendemain, Erwin n'était toujours pas de retour, ce qui me rappelais le premier jours des cours où il était aussi absent. Alors que j'entrais dans la cour, Victoire sautilla à ma rencontre en chantonnant un générique quelconque d'un vieux dessin animé pour enfants.

- Erwin n'est pas revenu ? me demanda la blondinette, tout sourire.

- Non... Et où est Charlie ?

- Pfeuh, sûrement à la bibliothèque...

- Ah, cool. D'ailleurs je dois aller rendre un livre ! m'exclamais-je. Victoire acquiesça et sautilla en direction de sa classe tandis que je me dépêchais d'aller à la bibliothèque. Sur le chemin, je sortis déjà le livre ("Dôme" de Stephen King) de mon sac et entrais dans la bibliothèque. Enfin, c'est ce que j'aurais dû faire si la bibliothèque était ouverte. En vrai, je m'écrasais contre la porte vitrée et tombais sur le sol, le nez en sang.

- Je rêve où c'est ta passion de tomber ? demanda alors Charlie qui se tenait derrière moi, me regardant un sourcil levé.

- Oui oui, j'adore le sol. Vivre par terre c'est ma passion... répondis-je d'une voix pleine de sarcasmes.


Charlie s'esclaffa pendant que je me relevais. Une fois debout, je fus face à Sebastian qui nous regardait, tout sourire.

- Alors les amoureux, ça va bien ? demanda-t-il d'une voix sympathique; ce qui était étrange pour lui. Je me mis à fixer le sol sans rien dire tandis que Charlie soupira.

- Qu'est-ce que tu veux ?

- Moi ? Mais rien, qu'est-ce qui te fait penser ça, cher cousin ? cousin ? Est-ce qu'il vient de l'appeler "cousin" ? Ça voudrait dire que...

- Vous êtes cousins ?

- Ah, tu ne l'as pas dit à ta petite-amie ? Nos pères sont frères alors oui, nous sommes cousins. Charlie Vincent Bach et Sebastian Bach. Comme le musicien et compositeur, Jean-Sebastien Bach. déclara Sebastian avec un large sourire.

- Mais... Hier, tu as parlé de Victoire comme si tu ne la connaissais pas !

- Je ne voudrais pas que toute l'école soit au courant que j'ai du sang en commun avec cette fille. Elle fait honte à la famille. Heureusement que Charlie est là pour rehausser un peu le niveau...

- Mais... C'est...

- Terringhan. Arrête. Va en classe, de toute façon les cours vont commencer. m'ordonna Charlie d'une voix dure que je ne lui connaissais pas. Je voulu me défendre mais il me lança un regard froid et j'obéis alors, partant en direction de mon cours de maths.

Au moment où j'entrais dans la classe, la sonnerie retentit et je couru m'asseoir à ma place, au fond.

- Terringhan, vous étiez limite. J'aimerais que ça ne se reproduise plus, compris ? j'acquiesçais et sortit mon classeur et mon livre de maths.

Mina, qui était déjà là, me fit un petit sourire que je lui rendis et elle lança un papier sur ma table. Je le dépliais et le lu: « Ça te dit qu'on mange ensemble à midi ? Rien que toutes les deux ? » Je réfléchis; Erwin n'était pas là, Charlie était bizarre et Victoire... était toujours bizarre et elle pouvait manger avec son frère. Je griffonnais un « oui » sur le verso et le lui renvoyais. Une fois l'heure du déjeuner arrivée, je me hâtais de rejoindre Mina pour qu'on aille ensemble à la cafétéria. Vu que j'avais art plastique et elle anglais en dernière heure, je devais l'attendre devant ma classe. J'attendis pendant un petit moment avant de me dire que, peut-être, elle m'attendait devant sa classe. Je marchais alors dans les couloirs, déserts, jusqu'au troisième étage du bâtiment, là où se trouvait la classe de Mina. Mais elle n'étais pas là non plus.

Je décidais de lui envoyer un message auquel elle ne répondit pas. Je soupirais et, n'ayant pas envie d'aller dans la cafétéria, je m'installais dans la cour, dans un coin isolé et commençais à manger. Pourquoi Mina avait-elle fait ça ?

- Bah alors, tu fais quoi ici ? T'es pas avec Charlie et Victoire ? je levais les yeux vers Erwin qui se tenait face à moi, les mains dans les poches.

- Je... Et toi, alors ? Tu fais quoi ici ?

- J'étais malade. Mais ça va mieux. Donc, tu va me répondre ? Qu'est-ce que tu fais ici ? il me fixa d'un air sérieux et je soupirais.

- J'avais envie de manger à l'extérieur. Il faut profiter des derniers jours de beau temps.

- Il fait dix degrés et y'a des nuages. En plus, la cafétéria a des tables extérieures. Tu ne sais pas mentir. Alors dis moi, pourquoi tu manges seule dehors ? son ton était ferme et je me sentis un peu comme une enfant qui se faisait gronder. Je lui racontais alors que Charlie et Sebastian étaient cousins, que Mina m'avait posé un lapin et que je n'avais pas envie de manger à la cafétéria. Erwin secoua la tête puis enleva son écharpe et me la tendit.

- Quoi ?

- Prend-la, tu as froid. Ça se voit. dit-il en l'enroulant autour de mon cou. Erwin s'assit à côté de moi et sortit son repas de son sac.

- Tu ne va pas retrouver Charlie et Victoire ?

- En te laissant seule ? Non. Ils sont deux, eux. Je souris timidement et avala mon sandwich. Néanmoins, je me demandais si cette maladie était la même qui l'avait empêché de venir en classe le premier jour des cours... Je n'osais pas lui demander et continuais mon déjeuner en silence.

- Et sinon, tu va faire quoi avec ta... "Meilleure amie" ? demanda Erwin en brisant le silence. Je me concentrais sur mes chaussures et haussais les épaules. Qu'est-ce que je pourrais bien faire ? Lui en vouloir ? Non, je ne pourrai jamais détester Mina. C'est ma meilleure amie depuis toujours, je ne m'imagine pas sans elle...

- Tu devrais aller lui parler. Elle t'a fait de la peine, non ? Je parie que tu n'oses pas, de peur de te fâcher avec elle... comment sait-il ? Il est devin ? Je le regardais en soupirant. Non, vraiment, je ne veux pas perdre Mina.

- J'ai déjà connu ça, se fâcher avec son meilleur ami... Avant, j'avais un meilleur ami comme toi et Mina. Il sortait avec une fille que je ne supportais pas. Un jour, je l'ai surprise en train de tromper mon meilleur ami et j'ai voulu le lui dire mais elle m'en a empêché en me disant que si je rapportais ce que j'avais vu, elle dirait que j'avais essayé de la peloter. Je ne l'ai pas écoutée et je suis allé le dire à mon meilleur ami mais c'était trop tard...

- Elle était allée lui dire que tu l'avais peloter ?

- Yep. Après ça, il n'a jamais plus voulu m'adresser la parole...

- Oh... C'est dur... Mais... Mina n'est pas comme ça. Elle acceptera de m'écouter pour que je puisse m'expliquer ! Erwin poussa un petit rire et me sourit.

- Les choses ne se passent pas toujours comme on l'espère... Bon, on va déjà en classe ? demanda-t-il en ébouriffant mes cheveux.

- Je dois passer à la bibliothèque avant ! répondis-je en brandissant mon livre.

- Va parler avec Mina ! Je vais aller ramener ton livre. dit-il en attrapant le livre, partant déjà vers la bibliothèque.

Erwin m'ayant dit d'aller parler avec Mina, j'avais décidé d'obéir et étais partie chercher ma meilleure amie. Après quelques minutes de recherche dans le bâtiment, je la vis finalement avec Sebastian et sa bande. Je m'approchais timidement et tira sur la veste de Mina.

- Qu'est-ce que tu me... Ah, Alice... Euh, qu'est-ce que tu fais là ?

- Je... Euh... Est-ce qu'on peut parler, s'il te plaît ? je balbutiais et aperçu le regard rieur de Sebastian.

- Oui oui, j'arrive les gars ! elle attrapa alors mon bras et me tira à l'écart du groupe.

- De quoi tu voulais parler ?

- Ce midi... On avait dit qu'on mangerait ensemble et... Tu ne m'as pas attendue... Alors je voulais savoir pourquoi...

- Ah oui... J'ai oublié ! Je suis vraiment désolée, tu me pardonnes ? Mina me lança LE regard qui fit que je ne pouvais pas lui en vouloir. J'acquiesçais en haussant les épaules et elle me prit dans ses bras avant de me saluer et de retourner vers Sebastian qui me fixa bizarrement. Je levais alors la tête pour regarder les nuages qui s'estompaient et tomba sur Erwin planté devant une fenêtre de notre classe, souriant comme un benêt. Est-ce qu'il nous regardait ? Je me hâtais de le rejoindre en montant quatre à quatre les marches.

- Pourquoi tu souriais comme un idiot devant la fenêtre ? lui demandais-je en le rejoignant.

- Tu t'es réconciliée avec ton amie alors je suis heureux pour toi ! s'exclama-t-il en écartant les bras, assommant un garçon au passage. Le garçon en question lança un regard mauvais à Erwin et partit s'asseoir à sa place.

- Bah alors, qu'est-ce qu'il a poil-de-carotte ? ricana Erwin. Je soupirais et lançais de nouveau un regard vers le garçon. Je compris alors pourquoi Erwin l'appelait comme ça; le garçon était roux. Il avait aussi une grande paire de lunettes rondes et un nœud papillon.

- Erwin ! Ne te moque pas des gens ! réprimandais-je mais il ne m'écouta pas et alla s'asseoir à sa place. Je soufflais et allais à la mienne.

Je sortis déjà mes affaires et observais les gens qui entraient dans la salle. Ils allaient tous vers leurs amis, ils rigolaient, ils discutaient. Puis le cour commença. Histoire. J'adore cette matière, vraiment ! Mina et Sebastian étaient absents, ce qui ne m'étonnait plus vraiment. Déjà avant, Mina séchait souvent les cours et pourtant elle réussissait toujours les examens. Pourquoi ? Parce que je lui passais toutes mes fiches. Je ne voulais pas qu'elle rate ses années et qu'on soit séparées à cause des ses mauvaises notes.

- Eh, Alice ! Psssssssst !

- Qu'est-ce que tu veux Erwin ?

- Ça te dit après les cours on va dans un café ? Avec Victoire et Charlie ? je haussais les épaules et me reconcentrais sur la tragique histoire de Napoléon Bonaparte.

***


- On y va ? s'exclama Erwin, enjoué en passant son bras sur mon épaule. Victoire et Charlie nous rejoignirent devant l'école et on alla tous ensemble dans un petit café du centre-ville, nommé le Junk's. Il y avait déjà une bande de jeunes assis autour d'une grande table alors nous allâmes nous asseoir au fond du café.

- Vous commandez quoi ? demanda Victoire alors qu'on s'installait.

- Je vais prendre un coca ! répondit Erwin toujours très enjoué.

- Pareil pour moi.

- Euh... Je vais prendre un thé froid... dis-je en sortant mon porte-monnaie.

- Laisse, je vous offre les boissons ! déclara Victoire en trottinant jusqu'au comptoir. Mis à part les autres adolescents qui riaient bruyamment, la salle était assez silencieuse. Surtout autour de notre table.

- Et alors, Sebastian c'est votre cousin à Victoire et toi ? lança Erwin en brisant le silence. Charlie me lança un regard froid et soupira.

- Oui.

- Ah. C'est pas cool ça.

- Non.

- Surtout que Sebastian est vraiment stupide.

- Oui.

- Erwin ? D'où tu connais Sebastian en fait ? lançais-je à mon tour. Cette fois-ci ce fut le noiraud qui me regarda froidement et je su que je devrai me taire à l'avenir. Finalement Victoire revint avec nos boissons et le numéro de téléphone du barman.

- Il m'a proposé de faire un marathon Mon Petit Poney ce week-end ! s'exclama-t-elle, toute heureuse. Charlie, Erwin et moi nous nous regardâmes avant d'éclater de rire.

- Bah quoi ? demanda naïvement Victoire alors qu'Erwin repartit dans son fou-rire. Charlie se calma et réussit à expliquer à sa sœur que se faire un marathon Mon Petit Poney n'était pas la meilleure activité pour un week-end ce à quoi la blonde répondit qu'elle s'en fichait. Erwin était plié de rire sur la table et moi je pouffais aussi un peu.

Quand nous sortîmes du café, les jumeaux partirent dans une différente d'Erwin et moi alors le noiraud proposa de me raccompagner chez moi, ce que j'acceptais; non sans réserve.

- Donc... Tu penses vraiment que Victoire va aller chez ce gars pour regarder Mon Petit Poney ? demanda Erwin en rigolant un peu. J'haussais de nouveau les épaules.

- Je sais pas. J'imagine que oui. Victoire fais toujours ce qu'elle veut même si c'est complètement ridicule ou stupide...

- Sauf quand Charlie l'en empêche !

- Sauf quand Charlie l'en empêche.

- Et toi alors ? Tu va faire quoi ce week-end ?

- Je pensais réviser un peu puis faire une balade avec mon chien. Peut-être que je regarderai des films aussi, qui sait ? répondis-je distraitement. Je ne remarquais pas tout de suite qu'Erwin s'était arrêté. Je me retournais pour lui faire face; il semblait bizarre. Comme gêné.

- Je-je pourrais venir chez toi ? Pour regarder les films je veux dire ! Ça pourrait être plus sympa que toute seule, non ?

- Si tu veux. Bon, je suis arrivée. Envoie-moi un message quand tu veux venir, je pense pas sortir de toute façon ! j'avais lancé ça depuis le palier et couru dans la maison avant qu'il puisse me répondre. Pourquoi était-il si gêné de me demander ça ? Et pourquoi avais-je fui de la sorte ? Nous n'étions que des amis. De simples amis...

Quand j'arrivais chez moi, je montais directement dans ma chambre mais malheureusement, Lou, ma demie-sœur cadette, était couchée sur mon lit en train de lire un magazine.

- Je peux t'aider ? lui demandais-je, tout en rangeant mes affaires de cours. La petite blondinette se redressa, un sourire mesquin sur les lèvres. Cela ne présageait rien de bon, vraiment.

- J'ai une faveur à te demander... je sentais le mauvais coup venir à grande vitesse mais j'acquiesçais tout de même, la faisant continuer.

- Voilà... Ce week-end je devais faire un marathon de films avec Martin mais il s'est désisté et j'ai déjà tout prévu alors je me disais...

- Non.

- Quoi ?! s'écria-t-elle, tombant théâtralement à la renverse sur mon matelas. Ses petits yeux noirs me fixèrent à l'envers avant qu'elle ne se retourne pour être dans le bon sens.

- J'ai déjà prévu un truc ce week-end. Avec un ami.

- Parce que toi t'as des amis ?

- Tais-toi ! Bref, je peux pas faire ton marathon de films, j'en ai déjà un de prévu. lançais-je en me faisant une queue de cheval. Lou marmonna alors quelque chose d'incompréhensible et se leva.

- Je n'ai qu'à venir avec vous ! De toute façon, si tu es seule avec lui, tu va lui faire peur à ton "ami" ! Et en plus j'ai déjà acheté plein de pop-corn au caramel !

- Il y en aura au chocolat ? demandais-je, curieuse.

- Bien sûr ! répondit-elle avec un large sourire. Ma volonté flancha et j'acceptais qu'elle nous rejoigne. Mais nom de Zeus, qu'avais-je fait ?

En fait, je ne voyais pas pourquoi cela aurait pu me gêner vu qu'Erwin n'était que mon ami. Je crois que peut-être ça le gênerait lui, non ?

Quand le samedi arriva, un peu trop vite à mon goût, Erwin sonna chez moi à dix-huit à heures tapantes. Étant donné qu'il n'était pas venu en cours les jours précédents, j'avais pensé qu'il ne viendrait pas aujourd'hui; ce qui m'aurait un peu soulagée... Dès que j'ouvris la porte, Lou sauta devant moi et salua Erwin avec un large sourire.

- Euh... Lou, ma petite sœur, s'est incrustée... Ça te dérange pas ?

- Non non, c'est cool ! s'exclama-t-il. La blondinette le conduisit au salon tandis que j'allais vérifier le popcorn à la cuisine. Quand je revins dans la pièce, Lou et Erwin semblaient de battre.

- Qu'est-ce qui se passe ? demandais-je, restant plantée devant eux.

- Ton copain il veut pas qu'on regarde Game Of Thrones !

- Que... Comment tu connais cette série toi ?

- Bah c'est Martin, il l'adore ! se défendit la cadette en ronchonnant. Martin est mon grand frère et le grand demi-frère de Lou. J'acquiesçais; c'est vrai que Martin est un grand fan de cet univers, ayant lu tout les livres et vu la série en entière.

Finalement, nous décidâmes de regarder Harry Potter. Lou était terrifiée par Touffu, le chien à trois têtes d'Hagrid, tandis qu'Erwin ricanait constamment à cause de la coupe de cheveux d'Harry. Après le troisième film, Lou s'était endormie, s'étalant en travers d'Erwin et moi.

- Euh... Elle est lourde ta sœur...

- Dans tous les sens du terme ?

- Nan... Elle doit peser trente kilos seulement ! on rigola ensemble.

- Bon, j'en ai un peu marre d'Harry et compagnie... T'as des jeux de société ou un truc du genre ? demanda Erwin en repoussant doucement Lou.

- Hmm, laisse moi allez voir ! répondis-je en me levant du canapé, faisant tomber Lou par terre.

Pendant que Lou embêtait Erwin, je cherchais des jeux de société et je trouvais une vieille boîte de scrabble.

- J'ai trouvé un Scrabble ! D'ailleurs je crois bien que c'est le seul jeu qu'on a...

- Alors jouons ! s'exclama Erwin, enjoué.

Je déposais le plateau de jeu par terre et donnais trois portants pour mettre les lettres. Je secouais le sachet contenant les fameuses lettres puis chacun en tira un certain nombre. J'avais trois "A", un joker, un "S" et deux "V"... Je rageais intérieurement et Lou commença en posant le mot "poisson", Erwin continua avec "vaches" et je désespérais de plus en plus. Qu'allais-je bien pouvoir placer ?

– Bon tu joues ou tu dors ? demanda Lou, impatiente. Je lui feulais dessus puis soupirais. Un éclair de génie me survint et je plaçais "vases" en levant les bras vers le plafond. Erwin rit et Lou râla puis posa "chatons" avec un air fier. Erwin enchaîna avec "œdipe" et nous écrasa jusqu'à la fin de la partie.

– Bon, je dois rentrer chez moi ! s'exclama Erwin, remontant ses lunettes sur son nez. Lou pleurnicha et s'agrippa à son bras, il la repoussa gentiment. Il me fit un signe de la main, mît sa jaquette et partit. Pendant plus d'une heure après son départ, Lou ne cessa de me dire qu'il était vraiment beau et intelligent. Qu'il était l'homme parfait et qu'elle regrettait amèrement de ne pas être née plus tôt.

Je décidais finalement d'aller me coucher, épuisée par les paroles incessantes de Lou et surtout par la soirée passée avec Erwin. Emmitouflée dans mon duvet, je me mis à penser à la soirée que j'avais passée. Elle était vraiment super ! Alors pourquoi est-ce que je me sentais étrange ? Cette pensée me poursuivit jusqu'à ce que je m'endorme, sombrant avec les ronflements lointains de Lou pour bande sonore.

Quand je me réveillais le lendemain, il était treize heures et je m'étonnais que personne ne soit venu me dire de me lever. Je mis une jaquette par dessus mon pyjama —un simple short de sport et un t-shirt bien trop grand— et descendis à l'étage qui se trouvait être désert. Mais diantre, où étaient-ils tous passés ? Quand je passais la tête dans l'entrebâillement de la cuisine, je fus surprise d'y trouver Victoire et Charlie en pleine séance de chuchotements avec ma mère. Par la barbe de Merlin, mais que faisaient-ils ?

– Je vous dérange peut-être ? demandais-je après m'être raclé la gorge. Ce qui est marrant c'est qu'ils ont tous tournés leurs têtes en mode « dramatic chipmunk » et que moi je les fixais à la façon de Mr. Trololo pendant que mon cerveau était rempli de l'image de leek spin qui tournait —littéralement— en rond.

Je revins à moi quand Charlie fit claquer des doigts devant mon nez.

– Ohé, la terre appelle Alice !

– Hein ? Oh, désolée... J'ai bugué.

– Bugué ?

– Leek Spin.

– Outch... il rigola puis retourna s'asseoir sur la chaise du bar où il se tenait précédemment.

– Au fait, qu'est-ce vous faites là ? demandais-je en m'installant à mon tour autour du bar de la cuisine. J'attrapais au passage le bras de ma mère qui avait tenté de se glisser —pas— très discrètement en dehors de la pièce. Victoire se laissa glisser sur sa chaise comme si elle coulait et Charlie fit semblant de ne pas m'avoir entendue. Quelle belle bande de lâches ils font !

– Il me semble que je vous ai demandé ce que vous faisiez là ! Dans ma cuisine, chez moi, à faire des messes basses avec ma maman à moi.

– Oh, trois fois rien. On passait dans le quartier alors on a voulu te dire salut mais tu dormais. Alors on a discuté avec ta maman à toi en attendant. Victoire me sourit gentiment tandis que Charlie se grattait nerveusement la tête.

– Bon c'est pas tout les jeunes mais je dois y aller ! Aller, à plus tard ma pucette ! pucette ? Sérieusement ? Cela faisait des années qu'elle ne m'avait plus appelée comme ça... Je vais fondre de honte. Vraiment...

– Euh vous voulez manger un truc ?

– Non, c'est bon on ne va pas te déranger plus longtemps ! les jumeaux me saluèrent avant de fuir littéralement ma maison. Je crois bien que quelque chose de louche de profile à l'horizon. Et je n'adhère pas.