« Ramène-lui des fleurs ! » Avait dit Stannis. Comme si des fleurs adouciraient ses mœurs ! Quelle idée débile ! Il n’aimait même pas Cersei. Elle le regardait toujours de travers et il savait très bien qu’elle parlait de lui avec Robert, le soir dans leur lit conjugal. Déjà que son frère n’était pas malin, depuis qu’il s’était marié avec elle c’était devenu pire ! Renly détestait cette femme et sa famille. Mais il se retrouvait obligé de lui acheter des fleurs et d’assister à chaque dîner de famille en sa compagnie. Vraiment, quelle plaie.
Stannis lui avait donné l’adresse d’un fleuriste pas loin de chez Robert et Cersei. Il lui avait dit qu’il aurait le temps de passer chercher n’importe quel bouquet avant de les rejoindre pour dîner. Mais bien sûr, il ne pouvait pas se ramener avec trois pauvres tulipes ou même des roses. Cersei ne le lui pardonnerait jamais. Vraiment, jamais.
Il trouva la boutique sans trop de peine. En même temps il y avait des fleurs partout ! Logique, après tout, c’est le but d’un fleuriste. Mais il se sentait presque menacé. Il poussa la porte qui fit tinter une petite clochette. L’intérieur était identique à la devanture ; des plantes diverses qui semblaient jaillir de partout. Renly aurait été incapable d’en nommer ne serait-ce qu’une seule. Heureusement, personne ne le lui demanda. A vrai dire, la boutique semblait vide. Enfin, il n’aperçu aucun autre être humain au premier abord. Rien que des feuilles et des fleurs. Des tableaux de verts, de rouges, d’orange et de jaunes. Il y avait même de jolies fleurs bleues. C’était tout à fait charmant, il faut l’admettre. Mais Renly n’avait pas le temps pour le charmant, il devait être chez Robert et son despote d’épouse avant dix-huit s’il voulait éviter qu’on ne lui fasse des reproches toute la soirée.
– Hello ? Il y a quelqu’un ? il s’avança un peu timidement, s’enfonçant dans les profondeurs du magasin. Il se dit qu’il aurait dû laisser des petits cailloux derrière lui parce que plus il avançait, plus il avait l’impression qu’il ne ressortirait jamais. La boutique n’était pas grande, non. C’était au-delà de ça. Il y avait bien des petites flèches sur les murs pour indiquer les différentes sections mais la plupart étaient à moitié cachées par du lierre ou une plante du même style. Et puis il y avait une tonne de couloirs ! Même plus ! Ils tournaient, l’entraînaient dans les méandres d’un lieu inconnu. Renly pensa un instant que c’était un plan de la machiavélique Cersei. Elle avait fait construire cette boutique hantée au milieu de la ville et désormais il était condamné à errer dans ces couloirs jusqu’à sa mort.
Au moment où il se dit que ça ne servait plus à rien et qu’il finirait sûrement par mourir de faim et de déshydratation dans ce lieu maudit, une main de posa sur son épaule, le faisant sursauter et hurler comme une collégienne dans un mauvais film d’horreur. Il se retourna en tremblant, plaquant son dos contre un mur. Cette fois, c’était sûr, il était mort. Un ange était venu le chercher. Qu’est-ce que ça aurait pu être sinon ?
La personne face à lui était un garçon. Un peu plus jeune que lui, ça se voyait, mais le dépassant de quelques centimètres. Il fronçait ses sourcils, plissant des yeux d’une couleur semblable à celle du miel. Sur son front, quelques boucles d’or tombaient en cascade, réitérant cela sur sa nuque. Il avait un cou long et gracieux. Et il portait un t-shirt noir au col assez large pour que Renly puisse entrevoir ses clavicules. Il ouvrit les lèvres, des lèvres toutes roses qui semblaient douces comme la peau d’une pêche, et les referma aussitôt. Il semblait perplexe. Renly ne savait pas quoi dire. Aussi, il balbutia ses premières pensées ;
– Est-ce que je suis mort ?
L’ange fronça ses sourcils de plus belle, faisant apparaître une petite bosse à la naissance de son nez. Renly n’avait rien à dire sur ce nez. Mais il l’aurait volontiers couvert de baisers comme le reste de sa personne. Sauf que le garçon ne répondit pas. Il secoua la tête et lui fit signe de le suivre dans le couloir. Peut-être l’emmenait-il au purgatoire ? C’est vrai qu’il avait fait des choses condamnables dans sa vie mais à son humble avis, Renly trouvait qu’il méritait le paradis. Ou au moins quelque chose y ressemblant. Ça lui suffirait de simplement rester devant l’entrée.
Mais pour le moment, il suivit le blond dans le long couloir qui semblait devenir de plus en plus sombre. Il avait plus souvent entendu parler de lumière blanche. Alors il allait vraiment en enfer ? Robert ne lui avait donc pas menti quand il disait que les homosexuels allaient en enfer... Il était un peu déçu. Mais bon, la compagnie était plutôt charmante alors il pourrait bien en profiter.
Finalement, ils débouchèrent dans une sorte d’arrière boutique. Ou peut-être était-ce la pièce où Renly était arrivé ? En toute honnêteté, il n’aurait pas su la reconnaître. Cela faisait seulement dix minutes qu’il déambulait dans ce labyrinthe mais ça lui avait semblé durer des siècles. Il était éprouvé. Il avait besoin de s’asseoir et de boire beaucoup d’alcool. L’ange le dévisageait toujours avec beaucoup de perplexité. Il le lâcha du regard pendant un petit moment, histoire de tapoter quelque chose sur son comptoir puis il releva la tête. Il était vraiment très beau. C’était peut-être ça l’enfer : rester éternellement coincé avec un homme magnifique dans une boutique étrange. Avec la veine qu’il avait, le garçon était sûrement hétéro. Quelle plaie.
Alors qu’il s’apprêtait à lui demander s’il n’avait pas un bouquet de tulipes qui trainait quelque part, une jeune femme arriva par une autre porte. Copie conforme de l’ange à l’exception de ses longs cheveux bruns et de ses yeux verts clairs, pétillants. Elle sautillait avec aisance sur ces deux longues jambes qui semblaient à peine la porter.
– Bonjour ! Désolée de l’attente, je peux vous aider ? elle parlait comme une chante une chanson. Quelque chose de doux et d’harmonieux. Renly se dit que face à eux deux, il aurait bien aimé être bisexuel.
– Euh... Oui ? J’aurais besoin d’un bouquet. Quelque chose d’assez pimpant, si possible... Je ne m’y connais pas vraiment en fleurs. C’est pour la femme de mon frère !
– Une belle-sœur, je vois, parfait. elle se tourna vers ce qui devait sûrement être son frère et alors elle agita gracieusement des mains.
Le regard de Renly alla de cette beauté à l’ange qui répondit en hochant la tête puis à la jeune femme à nouveau. Il était malentendant. Point positif: il ne l’avait pas entendu raconter n’importe quoi. Point négatif: Renly ne connaissait rien à la langue des signes. Il était déçu. Réellement.
Il regarda le garçon partir. Parce que oui, au final c’était un garçon et pas un ange, même si les apparences pouvaient être trompeuses.