Imaginez un monde où les hommes repoussent les limites de la technologie et de la science. Une réalité irrationnelle où des êtres immortels existeraient. Le rêve fou de tout scientifique. Imaginez seulement le nombre infimes de possibilités que cet endroit offrirait à chaque habitant. Pouvez-vous seulement oser y penser sans avoir envie de le visiter ?
Et bien sachez une chose: ce monde existe.
C'est le monde dans lequel je suis née et dans le quel je vis depuis 17 ans. Je m'appelle Indie et je suis un cyborg.
« Les cyborg sont des êtres qu'on pourrait qualifier d'immortels. Leur capacité de régénération est telle que quand une de leur cellule meurt, une copie est automatiquement créée par ce qui est appelé la matrice —leur cerveau pour faire plus simple— et ainsi, chaque blessure, même interne, peut se refermer seule. L'unique moyen de tuer un cyborg serait de le pirater et de le désactiver à l'aide de son code de création. [...]
La plupart des cyborg possèdent une très grande force, une couleur de cheveux et d'iris inhabituelle et une vue pouvant distinguer n'importe quel petit détail à plus de 2km. » –Extrait de la conférence de presse du Dr. Kamashiro, expert en cyborg et autres modifications génétiques.
« D'après une récente étude, nous avons découvert que les cyborgs étaient dotés d'une capacité de réflexion infinie. Pour faire plus simple, un cyborg d'âge moyen peut réfléchir intensément pendant plusieurs heures sans jamais se déconcentrer. Pratique, non ? »
— Extrait issu du livre “Études de Cyborgs et anecdotes anodines” par le Dr. Kamashiro
Les rumeurs courent énormément autour de moi. On dit que les cyborgs n'ont pas besoin de manger, qu'ils ne peuvent pas dormir et même qu'ils n'ont pas de sentiments. Bien évidemment, tout cela est faux. Un cyborg n'est pas une machine, c'est un être fait de circuits électriques et de chair. Mais bien souvent, les gens ne comprennent pas la différence.
À vrai dire, la plupart ont peur des cyborgs. Ils pensent sûrement que nous pouvons les tuer grâce à des lasers incrustés dans nos yeux ou alors qu'on cache des bazookas dans nos avant-bras. J'aimerais clarifier certaines choses: non, je n'ai pas d'arme à feu cachées dans mes avant-bras ou de lasers dans les yeux ! C'est pénible à la fin. La plupart des cyborgs sont des êtres nés pour être au service d'un tuteur ou d'une tutrice. Bien sûr que, depuis le temps, des gens les ont utilisés pour faire le mal mais cela n'est que très rare et la plupart des fois c'est la faute du tuteur, pas du cyborg.
– Eh oh ! Indie ! Tu dors ? la voix de Craig me tire de mes pensées; bien évidemment que je ne dors pas. Qu'est-ce qu'il est bête... Apparement, cela fait dix minutes qu'il agite frénétiquement sa main devant mon visage sans obtenir de réponse.
– Hein ? Désolée, je me suis perdue dans mes pensées... je lui souris bancalement et il hausse les épaules. Craig est peut être stupide mais, au fond, c'est un bon garçon. C'est d'ailleurs l'un des seuls qui m'accepte telle que je suis dans ce lycée pourri. Bon, d'un côté, je comprend les gens: côtoyer chaque jour une fille mi-robot, mi-humaine est un peu angoissant.
Surtout quand on sait tout ce que ma matrice est capable de faire ! Je peux le régénérer à l'infini, modifier mes paramètres basiques toute seule et même ajouter de nouvelles compétences à mon système de données alors que d'autres cyborgs ne savent même pas comment enclencher leur mode apprentissage ! Ahah dans ces moments là je me sens tellement au dessus d'eux. Et puis je me souviens que j'habite dans une ville perdue au milieu de rien et, qu'au fond, ce n'est pas grave pour eux de ne pas savoir faire la différence entre une donnée de synthèse et une cartouche mémorique !
Mais bref, je m'égare. Craig est mon meilleur ami depuis notre première rencontre, il y a deux ans; une bande de mauvais garçons l'embêtaient alors je suis allée l'aider. Quelle aubaine que je venais d'ajouter des cartouches de sports de combats dans ma matrice ! Ces sales gosses ont fini à l'hôpital et moi j'ai dû devenir son garde du corps personnel. Enfin, ce n'était qu'un prétexte; Craig est fasciné par tout ce qui touche à la robotique et aux cyborgs alors je le laisse m'étudier, je le protège et en contre partit il m'offre ce que je veux. Comme de la nourriture, des vêtements ou, le plus souvent, des jeux vidéos.
– Pas grave... Bon, je voulais juste te dire que ce soir je ne peux pas rentrer avec toi, j'accompagne Gemma à la bibliothèque ! j'acquiesce et soupire; je ne sais même pas ce que je fais à l'école... Si j'ai besoin d'apprendre quelque chose, j'ai juste à le graver sur une cartouche mémorique et l'enregistrer dans ma base de données, ce n'est pas plus difficile que ça. Pourtant, mes tuteurs m'y ont inscrite dès que j'ai eu l'âge d'y entrer et j'ai interdiction totale de me servir de mon côté « robot » quand je suis à l'école. Alors pas d'ouïe perçante pour les ragots, pas de cartouches ou de rayons X. Rien ! Ce n'est pas l'enfer mais ça y ressemble... Le comble c'est que j'arrive à avoir des bonnes notes avec tout ça alors tous les autres élèves se sont ligués contre moi car ils pensent que je réussis grâce à mes « talents ». C'est complètement débile...
– Bon, miss Robot, à demain ! Craig me laisse devant la grille du lycée et s'éloigne en compagnie de Gemma. Ils forment un beau couple je trouve... Craig est pas mal comme garçon avec sa grande taille et ses cheveux blonds coiffés/décoiffés. Il a des grands yeux bruns qui s'accordent parfaitement avec les bouclettes de Gemma. Cette fille a des yeux bleus tellement beaux que j'en suis jalouse ! Bref, je mets mon sac sur mes épaules, réajuste mon manteau et pars en direction de la maison. Je pourrais prendre le bus mais il y a tellement d'idiots dedans que marcher ne me fait pas de mal.
– Eh les mecs, regardez y'a qui là-bas ! C'est le robot ! fichtre. Ils me saoulent ceux-là. Je rabat ma capuche sur mon crâne et accélère un peu. La dernière fois que ces crétins m'ont embêtée, il y en a deux qui ont fini à l'hôpital et moi j'ai passé une nuit en prison; maintenant je suis prévenue: si ils me retrouvent au milieu d'une bagarre et que je cause d'autres problèmes, ce sera les travaux d'intérêt généraux pour moi.
– Eh ! Réponds-nous quand on te parle ! Ta mère t'as jamais appris la politesse ? Ahahah, le truc marrant c'est que... Je n'ai pas de mère. C'est bête mais c'est comme ça. J'ai bien une tutrice mais je ne l'appelle jamais Maman, ce ne serait pas correcte pour ses vrais enfants.